Cédric Ehret : « Un entraîneur est avant tout un chercheur »

Responsable des U9 à l'AJA et président de la Commission technique du District de l'Yonne, Cédric Ehret exprime, à travers ces deux fonctions, sa passion pour le football et la formation. Interview.


Quel a été votre parcours sportif et professionnel ?

J'ai suivi un parcours sportif un peu atypique. J'ai débuté le football très tôt, à l'âge de sept ans, au club de Cours-la-Ville (Rhône), d'où je suis originaire. À 13 ans, je choisi de jouer au basket à Pont-Trambouze au niveau régional et jusqu'en quatrième division nationale (actuelle Nationale 2). À 20 ans, je suis retourné à mes premières amours, le football, en première série de championnat départemental à Cours-la-Ville. Parallèlement, je suis devenu professeur d'économie-gestion. J'ai d'abord été muté en région parisienne, puis à Auxerre, où je vis depuis 15 ans. Aujourd'hui, je suis directeur délégué aux formations professionnelles et technologiques au lycée Saint-Germain d'Auxerre. Mon fils a commencé à jouer au football à Venoy, où je l'ai suivi. Comme il n'y avait pas d'éducateur, j'ai pris en charge l'entraînement. J'ai alors passé tous mes diplômes d'entraîneur. De fil en aiguille, je suis devenu responsable technique du club et de l'école de foot, qu'on a créée et pour laquelle on a obtenu le label fédéral. Quand mon fils est venu à l'AJA à l'âge de 12 ans, je l'y ai suivi, il y a trois ans.

Qu'est-ce qui vous motive dans l'entraînement ?

Cela fait 15 ans que j'entraîne, pas toujours de façon continue, mais j'étais déjà entraîneur de football à 18 ans. J'ai encadré à peu près toutes les catégories, et depuis 10 ans je suis revenu sur les jeunes. Je suis enseignant à la base, j'ai choisi ce métier-là pour être avec les jeunes. Cela a toujours été ma motivation. J'ai connu des éducateurs qui m'ont transmis des valeurs et des choses que je veux à mon tour transmettre aux jeunes.

Pourquoi avoir choisi d'entraîner les U9 à l'AJA ?

Cette catégorie est super importante ! C'est vraiment le début de l'âge d'or du footballeur, là où on commence à acquérir toutes les qualités motrices et techniques. À cet âge-là, les jeunes sont vraiment des éponges. Tous les gestes qu'ils apprennent à l'entraînement, on les retrouve deux-trois semaines après sur le terrain. Avec eux, on voit tous les gestes techniques parce qu'il faut les ouvrir à tout. Un enfant de neuf ans, on ne va pas lui interdire de dribbler, même si on lui explique que le beau jeu est la priorité. Il ne faut pas les brider. Cette catégorie des U9 est souvent négligée dans les clubs [français]. Les clubs étrangers, en revanche, mettent vraiment la priorité sur ces petites catégories pour la formation. Je suis un formateur, j'aime faire progresser les joueurs. C'est une catégorie qu'il faut découvrir. Ce sont vraiment des diamants qu'on polit.

 

« A l'AJA, on a un petit temps d'avance sur les autres parce qu'on travaille bien avec les petites catégories »

 

Justement, comment trouvez-vous le niveau de vos joueurs ?

Nos U9 jouent formidablement bien, il faut venir les voir ! Techniquement, on a vraiment de bons joueurs. Ils jouent tous les samedis contre des clubs de la région parisienne, et notre meilleure équipe a remporté tous ses matchs. Pourtant, on n'a pas la même démographie qu'en Île-de-France. Le champ de recrutement des clubs franciliens est beaucoup plus important que le nôtre. Mais à l'AJA, on a un petit temps d'avance sur les autres parce qu'on travaille bien avec les petites catégories. Auxerre est une petite ville, on ne fait pratiquement pas de sélection mais on prend des joueurs qu'on forme et à qui on garantit de jouer. Mes 20 joueurs ont le même temps de jeu. On crée cet environnement positif, cet esprit d'équipe auxquels je suis très attaché. À cet âge-là, ils sont très individualistes. Chacun a son importance, mais il doit apporter quelque chose à l'équipe. L'équipe est plus importante que les individualités. Les joueurs se prennent au jeu. À la fin de l'année, c'est toujours un déchirement de les voir partir, dans les deux sens, mais ça veut dire qu'on a réussi notre mission.

En dehors de l'AJA, en quoi consiste votre rôle à la Commission technique du District de l'Yonne ?

Depuis trois ans et demi, je coordonne une équipe de 20 à 30 éducateurs bénévoles issus de clubs ruraux et urbains de tout le département. Nous intervenons en support des cadres techniques du District de l'Yonne et de la Ligue de Bourgogne sur des actions spécifiques, comme les sélections et les formations d'éducateurs. Nous travaillons également sur l'architecture des championnats et l'organisation de toutes les grandes manifestations : Coupes de l'Yonne, Fête des débutants, Festival U13, etc. On intervient aussi sur des actions citoyennes et éducatives à travers le Programme éducatif fédéral (PEF). Cette année, on a par exemple lancé le Pass Coaching pour la catégorie U18, une sorte de permis à points pour les éducateurs. Ils sont notés sur leur comportement avant et pendant le match, avec un challenge qui récompense le meilleur éducateur en fin de saison. Nous travaillons donc main dans la main avec les salariés du District et de la Ligue, de manière dévouée et bénévole. On est partie prenante dans toutes les décisions. En tant qu'élus, nous arrêtons la politique et les objectifs du District sur l'étendue des actions à mener, et nous les mettons en application.

Vos fonctions à l'AJA et au District sont-elles complémentaires ?

Je trouve qu'il est indispensable, quand on a une mission de président de commission technique, d'être sur le terrain pour ne pas être déconnecté des réalités et pour rencontrer nos homologues tous les samedis sur les terrains. Cela reste primordial d'avoir les mêmes préoccupations. Dans certains districts, les dirigeants sont totalement détachés de la technique, mais je pense qu'il est important que nous restions des hommes de terrain avant tout. Comme j'interviens dans des formations d'éducateurs, cette fonction m'apporte un certain recul, plus particulièrement sur le travail effectué par la fédération au niveau de la structuration des entraînements, notamment pour les jeunes. C'est vraiment une source d'idées, parce qu'un entraîneur est avant tout un chercheur et qu'il faut systématiquement trouver des nouveautés. Se confronter et rencontrer les éducateurs, c'est le plus enrichissant dans les formations. Échanger nos vécus et nos préoccupations nous fait avancer. Le travail d'animation et de motivation des bénévoles est aussi important parce qu'il faut du monde pour organiser des événements comme les Coupes de l'Yonne.

 

 


TEMPS ADDITIONNEL...

 

Quels sont vos diplômes sportifs ?

J'ai obtenu le Brevet de moniteur de football.

Quel est votre geste technique préféré ?

Le dribble en général, mais la virgule (intérieur-extérieur) en particulier, ou le flip-flap (extérieur-intérieur). Ce n'est pas un geste facile à faire. Je l'enseigne systématiquement aux enfants parce que c'est un dribble en mouvement, à la fois technique et spectaculaire. C'est un peu risqué. Le faire à froid, sans opposition, c'est un fait, mais le réussir face à un adversaire n'est pas toujours évident.

Quels entraîneurs vous ont inspiré au cours de votre parcours ?

Forcément, mes premiers entraîneurs, qui m'ont donné cette passion du football. Il y a aussi de grands coachs, des gens comme Jean-Claude Suaudeau, l'entraîneur emblématique du jeu à la nantaise, la base du jeu en mouvement, qui a inspiré le FC Barcelone. Mais aussi Pep Guardiola et le jeu de possession, ou encore Johan Cruyff. Je suis amoureux du mouvement et du jeu rapide. J'essaie toujours de m'inspirer de ces entraîneurs pour trouver des principes de jeu.

Quel est votre meilleur souvenir à l'AJA ?

C'est difficile d'en choisir un. La saison passée, nous avons gagné pour la première fois le tournoi national de Toucy en U9. Jusque là, l'AJA avait toujours échoué en finale, sans jamais s'imposer depuis la création du tournoi. Ce n'est pas tellement la victoire qui importe, mais le niveau de jeu qu'on a produit et la joie des enfants. Ces souvenirs sont indélébiles. Les joueurs m'en parlent toujours quand on se voit !

Auriez-vous une anecdote à partager avec les internautes ?

Il y a trois ans, lors d’un tournoi en région parisienne, un joueur de neuf ans du club de Ris-Orangis (Essonne), accompagné d’un autre joueur de son équipe, vient s’asseoir à côté de moi dans les tribunes et me pose tout en tas de questions sur l’AJA. Il me demande notamment si je connaissais personnellement Benoît Cheyrou, ex-joueur de l’AJA. Ces rencontres fortuites et fréquentes lors de nos déplacements montrent que l’AJA reste un club mythique et garde une image encore prégnante chez les jeunes joueurs. Pour l'anecdote, ce petit garçon n'était autre que le fils de Bruno Cheyrou, l'ex-joueur de Ligue 1 aujourd'hui consultant TV et frère aîné de Benoît...

Dernière modification le 5 décembre 2017